Page:Physiologie du gout, ou meditations de gastronomie transcendante; ouvrage théorique, historique, et à l'ordre du jour, dédié aux gastronomes Parisiens (IA b21525699).pdf/307

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Il est à remarquer qu’à peu près vers le même temps l’art de la cuisine florissait à la cour d’Angleterre. La reine Anne était très-gourmande ; elle ne dédaignait pas de s’entretenir avec son cuisinier, et les dispensaires anglais contiennent beaucoup de préparations désignées (after queen’s Ann fashion) à la manière de la reine Anne.

La science, qui était restée stationnaire pendant la domination de madame de Maintenon, continua sa marche ascensionnelle sous la régence.

Le duc d’Orléans, prince spirituel et digne d’avoir des amis, partageait avec eux des repas aussi fins que bien entendus. Des renseignements certains m’ont appris qu’on y distinguait surtout des piqués d’une finesse extrême, des matelotes aussi appétissantes qu’au bord de l’eau, et des dindes glorieusement truffées.

Des dindes truffées !!! dont la réputation et le prix vont toujours croissant ! Astres bénins dont l’apparition fait scintiller, radier et tripudier les gourmands de toutes les catégories.

Le règne de Louis XV ne fut pas moins favorable à l’art alimentaire. Dix-huit ans de paix guérirent sans peine toutes les plaies qu’avaient faites plus de soixante ans de guerre ; les richesses créées par l’industrie, et répandues par le commerce ou acquises par les traitants, firent disparaître l’inégalité des fortunes, et l’esprit de convivialité se répandit dans toutes les classes de la société.

C’est à dater de cette époque[1] qu’on a établi généralement, dans tous les repas, plus d’ordre, de propreté, d’élégance, et ces divers raffinements qui, ayant toujours été en augmentant jusqu’à nos jours, menacent

  1. D’après les informations que j’ai prises auprès des habitants de plusieurs