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MÉDITATION I.

les sexes l’un vers l’autre, et dont le but est la reproduction de l’espèce.

Il est étonnant que, presque jusqu’à Buffon, un sens si important ait été méconnu, et soit resté confondu ou plutôt annexé au toucher.

Cependant la sensation dont il est le siége n’a rien de commun avec celle du tact ; il réside dans un appareil aussi complet que la bouche ou les yeux ; et ce qu’il y a de singulier, c’est que chaque sexe ayant tout ce qu’il faut pour éprouver cette sensation, il est néanmoins nécessaire que les deux se réunissent pour atteindre au but que la nature s’est proposé. Et si le goût, qui a pour but la conservation de l’individu, est incontestablement un sens, à plus forte raison doit-on accorder ce titre aux organes destinés à la conservation de l’espèce.

Donnons donc au génésique la place sensuelle qu’on ne peut lui refuser, et reposons-nous sur nos neveux du soin de lui assigner son rang.

mise en action des sens.

2. — S’il est permis de se porter, par l’imagination, jusqu’aux premiers moments de l’existence du genre humain, il est aussi permis de croire que les premières sensations ont été purement directes, c’est-à-dire qu’on a vu sans précision, ouï confusément, flairé sans choix, mangé sans savourer, et joui avec brutalité.

Mais toutes ces sensations ayant pour centre commun l’âme, attribut spécial de l’espèce humaine, et cause toujours active de perfectibilité, elles y ont été réfléchies, comparées, jugées ; et bientôt tous les sens ont été amenés au secours les uns des autres pour l’utilité et le bien-être du moi sensitif, ou, ce qui est la même chose, de l’individu.