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nérale, gaie et souvent instructive ; cette dernière qualité était due à une précaution très-particulière que prenait Borose.

Chaque semaine, un savant distingué, mais pauvre, auquel il faisait une pension, descendait de son septième étage, et lui remettait une série d’objets propres à être discutés à table. L’amphitryon avait soin de les mettre en avant quand les propos du jour commençaient à s’user, ce qui ranimait la conversation et raccourcissait d’autant les discussions politiques qui troublent également l’ingestion et la digestion.

Deux fois par semaine il invitait des dames, et il avait soin d’arranger les choses de manière que chacune trouvait parmi les convives un cavalier qui s’occupait uniquement d’elle. Cette précaution jetait beaucoup d’agrément dans sa société, car la prude même la plus sévère est humiliée quand elle reste inaperçue.

À ces jours seulement, un modeste écarté était permis ; les autres jours, on n’admettait que le piquet et le whist, jeux graves, réfléchis, et qui indiquent une éducation soignée. Mais le plus souvent ces soirées se passaient dans une aimable causerie, entremêlée de quelques romances que Borose accompagnait avec ce talent que nous avons déjà indiqué, ce qui lui attirait des applaudissements auxquels il était bien loin d’être insensible.

Le premier lundi de chaque mois, le curé de Borose venait dîner chez son paroissien ; il était sûr d’y être accueilli avec toutes sortes d’égards. La conversation, ce jour-là, s’arrêtait sur un ton un peu plus sérieux, mais qui n’excluait cependant pas une innocente plaisanterie. Le cher pasteur ne se refusait pas aux charmes de cette réunion, et il se surprenait quelquefois à désirer que chaque mois eût quatre premiers lundis.