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mais au premier mouvement qu’il fit, le Charolais partit d’un coup de temps, et le coup fut tellement fourni que le chevalier était mort avant d’être tombé. Un de ses amis, témoin du combat, examina longtemps en silence une blessure si foudroyante et la route que l’épée avait parcourue : « Quel beau coup de quarte dans les armes, dit-il tout à coup en s’en allant, et que ce jeune homme a la main bien placée !… » Le défunt n’eut pas d’autre oraison funèbre.

Au commencement des guerres de la Révolution, la plupart de ces chevaliers se placèrent dans les bataillons, d’autres émigrèrent, le reste se perdit dans la foule. Ceux qui survivent, en petit nombre, sont encore reconnaissables à l’air de tête ; mais ils sont maigres et marchent avec peine ; ils ont la goutte.


Quand il y avait beaucoup d’enfants dans une famille noble, on en destinait un à l’Église : il commençait par obtenir les bénéfices simples qui fournissaient aux frais de son éducation ; et dans la suite, il devenait prince, abbé commendataire ou évêque, selon qu’il avait plus ou moins de dispositions à l’apostolat.

C’était là le type légitime des abbés ; mais il y en avait de faux ; et beaucoup de jeunes gens qui avaient quelque aisance, et qui ne se souciaient pas de courir les chances de la chevalerie, se donnaient le titre d’abbé en venant à Paris.

Rien n’était plus commode : avec une légère altération dans la toilette, on se donnait tout à coup l’apparence d’un bénéficier : on se plaçait au niveau de tout le monde ; on était fêté, caressé, couru ; car il n’y avait pas de maison qui n’eût son abbé.