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DU GOÛT.

nombre et en toute quantité, il faudrait une langue nouvelle pour exprimer tous ces effets, et des montagnes d’in-folio pour les définir, et des caractères numériques inconnus pour les étiqueter.

Or, comme jusqu’ici il ne s’est encore présenté aucune circonstance où quelque saveur ait dû être appréciée avec une exactitude rigoureuse, on a été forcé de s’en tenir à un petit nombre d’expressions générales, telles que doux, sucré, acide, acerbe, et autres pareilles, qui s’expriment, en dernière analyse, par les deux suivantes : agréable ou désagréable au goût, et suffisent pour se faire entendre et pour indiquer à peu près la propriété gustuelle du corps sapide dont on s’occupe.

Ceux qui viendront après nous en sauront davantage, et il n’est déjà plus permis de douter que la chimie ne leur révèle les causes ou les éléments primitifs des saveurs.

influence de l’odorat sur le goût.

10. — L’ordre que je me suis prescrit m’a insensiblement amené au moment de rendre à l’odorat les droits qui lui appartiennent, et de reconnaître les services importants qu’il nous rend dans appréciation des saveurs ; car, parmi les auteurs qui me sont tombés sous la main, je n’en ai trouvé aucun qui me paraisse lui avoir fait pleine et entière justice.

Pour moi, je suis non-seulement persuadé que, sans la participation de l’odorat, il n’y a point de dégustation complète, mais encore je suis tenté de croire que l’odorat et le goût ne forment qu’un seul sens, dont la bouche est le laboratoire et le nez la cheminée, ou, pour parler plus exactement, dont l’un sert à la dégustation des corps tactiles, et l’autre à la dégustation des gaz.