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SABBAT

saint Dominique qui voyait jaillir, des yeux de son crucifix, la première étincelle des bûchers espagnols.

« Croyez cela… » n’ont-ils pas cessé de me dire les uns et les autres. Quelle arithmétique, quel catéchisme ont jamais touché un poète ? Faire de Dieu une proposition mathématique ! Une révélation pour orphelines et sacristains ! Merci. Je préfère l’entrevoir dans les yeux du lièvre quand, de ses yeux dorés, il regarde la solitude.

Puisque personne n’a jamais raison pour tout le monde, laissons donc les poètes divaguer à leur aise. Quant à moi, nul ne m’empêchera de trouver, dans un conte d’Andersen, la morale éternelle, d’entendre se perpétuer la revanche du petit Poucet dans la carmagnole des Sans-Culottes et d’être persuadée que Robespierre fut plus influencé par le cynique Chat-Botté que par toute l’Encyclopédie.

— Folle !

— Oui… Mais un philosophe cesse-t-il de crier aux autres philosophes : « Messieurs, « vous faites erreur ? » Pour moi qui entends tout, cette pompeuse et courtoise formule veut dire : « Vous qui ne pensez pas comme moi, vous êtes des buses, des porcs et des chameaux. »

Ah ! soyons poètes, les poètes, et ne lisons pas les livres qui commencent ainsi : Théorème I. Ne passons jamais au second. Allons, plutôt, dans le jardin, et quand nous