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SABBAT

Le si bémol. — Je ne dirai pas grand’chose, car je suis tout petit, moi… Mais il est de jeunes hommes qui sont pâles comme… Satan quand ils m’écoutent tomber des doigts de Chopin, à la chandelle, dans le parfum des tilleuls…

Beethoven. — Arrière ! Arrière ! Chopin ? Ce Satan poitrinaire, langoureux et nocturne…

Chopin. — Il ne s’est pas vu, celui-là, avec son masque de sourd démoniaque et résigné.

Satan. — Il est des heures où c’est à n’y pas tenir. Mais qu’est-ce qu’ils ont donc tous, cette nuit ?

Jésus. — Quand je ne serais venu au monde que pour Judas et Jean, l’apôtre à la tête brune…

Satan, à part. — Je le chéris trop…

Jésus. — …Je bénirais mon crucifiement.

Satan, à part. — Ah ! mon frère ! Comme je t’ai trahi ! Comme j’ai reposé sur ton épaule !

Alfred de Vigny. — Il est celui qu’on aime et qu’on ne connaît pas.

Moi. — Si après toute cette frénésie exhalée vers Satan, on s’indigne que je lui aie consacré des pages fort convaincues, ma foi, eh bien ! je fais comme le Risque, comme le Jeu…

Satan. — Mais pas comme la sorcière… Sorcière !…