Page:Pichot - Monsieur de l'Etincelle, ou Arles et Paris, t. I, Gosselin, 1837.djvu/282

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cependant bien romanesque, il y a quarante ans, mon jeune ami ; mais j’étais aussi bien fière, et je ne me révoltais pas contre le gouverneur de la province de Saintonge, mon père, lorsqu’il répétait devant moi, comme s’il eût deviné mon sentiment secret pour son jeune secrétaire, que depuis dix siècles les demoiselles de Rollonfort n’épousaient qu’un membre de la famille de Tancarville, ou entraient dans un couvent. Votre père étouffa comme moi sa passion sans espoir, et sa seule consolation fut la certitude que je ne serais jamais du moins l’épouse d’un autre, lorsque je pris le voile en 1789. Je n’avais pas encore prononcé mes vœux, que la révolution vint abolir les couvents et me forcer de chercher avec ma famille un refuge d’exilés dans cette Angleterre dont nos aïeux avaient autrefois envoyé leurs fils cadets occuper les palais en conquérants. Ce fut là que j’appris que M. Mazade avait été moins fidèle que moi à notre serment commun de n’aimer qu’une fois. Tête exaltée comme je l’étais alors, je vous avoue que je lui en voulus beaucoup, et je ne lui ai peut-être