Page:Pichot - Monsieur de l'Etincelle, ou Arles et Paris, t. II, Gosselin, 1837.djvu/118

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une affreuse fatalité a seule pu dans le temps lui faire croire que j’avais oublié le soin de mon honneur et du sien. Il l’a cru, le monde l’a cru comme lui, le monde et lui ont été bien prompts à me condamner, bien injustes et bien cruels pour moi comme pour ce même M. d’Armentières que je ne dois pas laisser accuser non plus sans protester : mais Dieu seul peut proclamer un jour notre innocence, et dans l’autre vie seulement, car dans celle-ci on ne croirait pas à un miracle qui viendrait réfuter une calomnie favorite. Mais n’ai-je eu aucun tort ? mais n’ai-je pas donné à la malice du monde au moins quelques prétextes ? mon ami, pourquoi me ferais-je meilleure que je ne suis ? J’ai bien pleuré, j’ai pensé quelquefois que mes larmes m’étoufferaient, que ma douleur et ma honte me tueraient ; mais je leur ai survécu et le temps a triomphé de mon désespoir. Je suis femme, le malheur n’a pu refondre mon caractère : je me suis laissée aller peu à peu à accepter les distractions de ce monde que je n’estime pas, mais qui m’amuse ; qui me trompe, mais comme on trompe une reine