Page:Pichot - Monsieur de l'Etincelle, ou Arles et Paris, t. II, Gosselin, 1837.djvu/311

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dans ma pensée je me fusse promis de l’oublier et de me mentir à moi-même là-dessus, si c’était possible, dès que j’aurais mis la mer entre ma femme et moi.

— Vous l’avez été, et vous avez perdu votre femme ?

— Oui, monsieur, perdue !

— Je vous plains, monsieur, car j’ai connu cette douleur. Je la croyais au-dessus de toutes les consolations humaines, mais ma fille m’a consolé même de la perte de sa mère.

— Êtes-vous père, monsieur ?

— Oui, répondis-je, d’une fille.

— D’une fille ! eh bien ! fasse le ciel qu’elle ressemble à ma Dolorès !

Une fois sur ce chapitre, il était aussi difficile d’interrompre le vieillard que lorsqu’il s’abandonnait à son ressentiment contre son fils. Dolorès seule put le faire changer d’entretien en le suppliant d’attendre qu’elle ne fût plus là pour tant parler d’elle. Soit qu’acceptant le souhait du vieillard pour mon Isabelle, mon imagination la vit déjà grande et belle comme Dolorès, telle que je l’ai retrouvée, grâces au ciel ! après douze ans