un Saxon qui la sème sur un large espace du sol qu’il s’approprie[1].
La forme même sous laquelle les détails de la tradition sont parvenus jusqu’à nous, est suspecte : elle est toute romantique, et n’a point de caractère historique. Ce sont les premières défaites des Bretons que les chroniqueurs nationaux anglais s’efforcent de dissimuler, et quand par la suite, les chefs bretons sont vainqueurs des Saxons, ils deviennent doués de pouvoirs surnaturels, et une fortune toute providentielle ne cesse de les accompagner. Gildas, Nennius et Bède fournissent maint exemple de pareilles dissimulations, ou de semblables exagérations : ils ne cherchent qu’à flatter l’orgueil celtique, en lui mentant sur ses faiblesses et sur ses défaites, en lui représentant ses héros, sous la forme de demi-dieux.
Il faut reconnaître, sans doute, que tout le territoire ne fut pas soumis, sans résistance, dans ses différentes parties : çà et là, quelque hardi compagnon, ou la disposition favorable des lieux purent permettre aux indigènes de résister, même avec quelque succès temporaire, aux envahisseurs. Mais il est difficile de suivre le lent accroissement de la puissance germaine en Angleterre : avec constance et sûreté, de l’orient à l’ouest, du sud au nord, apparaissent bientôt les haches aiguisées et les longs glaives des Teutons ; tout cède devant eux, jusqu’aux citadelles où les indigènes ne tentent plus de sorties contre l’oppresseur. La masse du peuple accoutumée à la servitude romaine, se résigna à la perte de sa liberté, et souffrit peu de ce changement de maîtres : ceux dont le patriotisme était plus généreux, préférèrent l’exil à la sujétion[2]. La condition des Bretons, sous