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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/387

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& tels autres. Le Chardonneret est de moindre corpulence que le Pinson. Il pourroit bien estre mis en comparaison de grosseur au Tarin. Il est l’oysillon de la plus belle couleur que nul autre que nous ayons en France. On le nourrist en cage pour son plaisant chanter. Il y ha asses bonnes enseignes pour le sçavoir cognoistre d’avec les autres : c’est qu’il n’est jamais sans avoir du rouge dessous le front, & la gorge. Il ha aussi le dessus de la teste noire : mais les deux temples de chasque costé sont blanches. Partie de ses aelles sont noires, merquetees de blanc, ayant une grand tache jaulne en chasque costé, qui luy provient des plus grosses plumes de l’aelle. Il fait communement huit petits, & son nid par dedens les buissons, combien que lon en trouve quelquesfois qui le font en quelque arbre de bois tailli. On ne luy donne communement que du chenevis pour se nourrir, estant enfermé en cage.

Du Serin.
CHAP. XIIII.


LE SERIN ha prins son appellation Françoyse de l’excellence de son chant : car tout ainsi comme lon dit que les Syrenes endorment les mariniërs de la douceur de leurs chansons, semblablement pource que ce petit oyseau, de corpulence, quasi comparé à un petit Roytelet, chante si doulcement, il ha prins le nom de Serin. Ceux qui veulent louër les autres oyseaux de chanter plaisamment, dient qu’ils sçavent seriner. Il est rare sinon es païs chaulds. Parquoy les oyseleurs voulants y avoir profit, en prennent grande quantité, puis les apportent vendre es villes des plaines de France : autrement lon n’y en voirroit point. Aristote, à nostre jugement, le nomme Acanthis. Gaza l’ha traduit en Latin Spinus. Car Aristote au troisiesme chapitre du neufiesme livre des animaux, entend, qu’il est oysillon vivant de semences de charbons : mais nous le nourrissons en cage avecques de la semence de navette, comme aussi la Linotte. Il sembleroit que nous deussions penser, que c’est luy qu’on deveroit nommer Carduelis. Car Carduelis est nostre Chardonneret : toutefois Acanthis est autre chose : qu’on prouve par le dire d’Aristote en ceste maniëre. Victu & colore ignobilis est Spinus, sed valet vocis amoenitate. Par cela pouvons entendre que nostre Chardonneret, qui est de si belle couleur, n’est pas Acanthis : Car Aristote ha aussi dit que les autres oyseaux jaulnes estoyent de couleur mal plaisante. Ce qui nous fait croire que ce petit Serin est Acanthis en Aristote, c’est que lon voit les Grecs pour le jourd’huy le nommer Spinos, & Spinidia : c’est aussi diction Greque, dont Atheneus & Suidas ont fait mention : comme aussi Pollux ha escrit Spinidia. Virgile aussi au troisiesme livre des Georgiques, parlant de l’Halcyon vocalis, ha escrit ainsi : Littoraque Halcyonem resonant, & Acanthida dumi. On dit donc Acanthis, Spinus, & Ligurinus estre synonimes, mais differents à Carduelis : Car Pline au dixiesme livre de l’histoire naturelle, ha usé de ceste diction Carduelis, pour exprimer le Chardonneret, & Acanthis pour signifier le Serin. Gaza trouvant ceste diction (Acanthis) Latine, ne s’en est voulu contenter : car il l’ha tournee Ligurinus : toutesfois possible qu’il s’est voulu servir de la vulgaire diction de