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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/94

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L’Epeiche, le Tercot, le Grimpreau, & le Ternier ne sont grandement estimez, combien que quand on les ha prins à la pipee, on les rotist, & mange à la maniere des dessusdits. Tous petits oysillons qui hantent les hayes, & buissons sont quasi d’une mesme livree : mais il y ha election entre eux, tant à cause de leur pasturage, que pource qu’ils sont de diverses meurs. Toutes especes de Moineaux, qu’on nomme autrement Paisses (au jugement de Galien au tiers livre des aliments) sont de plus dure digestion que les Pigeons, Poulles, Perdris, & Francolins : mais moins durs que les Grives, Merles, Ramiers, & Turtrelles. Le Becafigue, ou Pivoine est es delices des seigneurs d’Italie. Les Rossignols, Fauvettes rousse & brune, Rougegorge sont prins l’esté allants boire en quelque mare des forests : touts lesquels sont de tresbon goust. Il y en ha d’autres qu’on ne mange point, pource quils n’ont rien de chair en leurs corps qui en vaille l’abillage, comme es petites Mesanges, au Poul ou Soulcie, au Roitelet, au Serin. Les Cretes ne mangent pas le Guespier nommé Apiaster, non plus que nous n’estimons beaucoup les Irondelles. Les Bruants, Grosbecs, Linotes, & Picaverets, les Montains, & Pinsons, Chardonnerets, Tarins, Verdiers, Lavandieres, Bergerettes sont quelque fois mangez, tant pource qu’on en prend grande quantité, que pource qu’ils sont gras en hyver. C’est merveille que l’estomach de l’homme puisse faire son profit de toutes manieres d’oyseaux, & toutesfois y en ha plusieurs dont les chiens affamez ne veulent gouster.

Discours sur les principales friandises es banquets de diverses nations : & des viandes qui ont esté exquises es aprests, tant des anciens seigneurs, que modernes : & de leur maniere de servir à table.
CHAP. XXI.


APres avoir estendu nostre parler sur diverses matieres apartenantes à la generation des oyseaux, en comparaison de celle de plusieurs autres animaux & plantes, avant finir ce premier livre, voulons encor conferer nostre maniere de vivre de maintenant & de servir à table, avec celle des estrangers, & raportants le tout à la maniere des anciens, aurons plaisir de sçavoir l’estimation sur la diversité de leurs friandises & viandes exquises. Parquoy il est à presupposer que comme nous avons profit, & plaisir de veoir les livres escrits, les uns de mille, les autres de deux mille, & trois mil ans, contenants ce dont les plus riches, & pauvres de ce temps lá se souloyent festoyer en leurs repas, aussi que d’icy à autant d’ans qu’il y ha que les susdits ont escrit, ceux qui voirront ce discours, ne le trouveront moins à leur gré qu’à nous est de voir maintenant ce qu’ils nous en ont escrit. Et tout ainsi qu’ils n’ont desdeigné nous mettre la maniere de vivre de leurs temps, aissi ne sera hors de nostre observation en la nature des oyseaux en dire sommaiment quelque petit mot : Car celuy qui entreprendroit assembler les escrits des autheurs qui en ont parlé, pourroit trouver matiere suffisante pour en composer un livre. Si entremettons les mesmes paroles de plusieurs autheurs Latins, ne pretendons l’entendre comme beaucoup d’hommes, qui en repetant quelques propos, dient que le Roy le leur ha ainsi prononcé, voulants par ce qu’on croye qu’ils ont faveur