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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/121

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D'UNE FEMME DU MONDE.

Je me mordis les lèvres et ne répondis rien.

— Faites-moi une petite place, là, à côté de vous.

Il souleva le drap, se glissa et son corps me frôla.

Je frissonnai.

— Vous avez froid, mon amour adoré ?

Un sourire bestial plissa sa bouche :

— Soyez sans crainte : dans quelques instants vous n’aurez plus froid.

Seules, les malheureuses qui ont connu l’épouvantable torture d’appartenir à un être dont tous les baisers, toutes les caresses froissent comme une insulte, salissent comme un outrage, savent tout ce qu’une femme peut souffrir en un pareil moment.

Il continua :

— Mais vous ne m’avez encore rien dit d’aimable, Raymonde ! Je t’aime, je t’aime à la passion, ma chérie !… M’aimes-tu un peu, toi ?

J’éclatai de rire, d’un rire nerveux, strident, sauvage, fait de rage impuissante.

— Ne te moque pas de moi, mon amour, et dites bien vite que vous l’aimez un peu, un tout petit peu, votre petit mari !