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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/126

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LE JOURNAL

découragée, et la vie continue, de nouveau sombre, monotone, affreusement monotone.

Sans cesse devant mes yeux se dresse le calvaire dont je gravis péniblement la pente et ne vois pas la fin.

Me rappelant les paroles du prêtre, l’abbé de la Vernière, qui est mon directeur, et les exhortations des bonnes sœurs, j’ai d’abord cherché des consolations dans la religion. Durant un mois, je fréquentai assidûment les églises, je courus de l’une à l’autre, avec la précipitation fébrile d’un malade qui court après le remède qu’il croit devoir le sauver. J’étais assoifée de consolations célestes et jamais lasse de prières ; j’usai fièvreusement toutes les formules des manuels religieux. Les trouvant insuffisantes à l’emploi des heures que je consacrais à mes dévotions, j’en inventai bientôt de nouvelles. Et puis je tombai dans des extases sans fin : la statue de la Vierge semblait me sourire, le Sacré-Cœur saignait devant mes yeux ravis, et je sentais en mon âme brisée se réveiller tout le mysticisme de mes jeunes années.

J’aimais tout particulièrement les petites chapelles de quartier, celles où la solitude est plus profonde ; il me semblait y être en com-