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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/16

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LE JOURNAL

très grande valeur, avaient été enlevées. Peut-être les répare-t-on : quelques-unes, en effet, avaient été endommagées et je me souviens que le pied d’un Hercule, qui assommait une grosse bête, était même tout à fait déchiré.

En ouvrant la porte qui donne sur la terrasse, un souffle d’air frais m’est arrivé en plein visage. Cette caresse un peu brutale, mais délicieuse, m’a tirée de mon engourdissement et de ma tristesse. De nouveau, tout à coup et sans savoir pourquoi, à la vue des corbeilles de fleurs où éclatait la pourpre des géraniums, devant le ciel bleu, tout uni, sans un nuage, sans une ride, aux chants des oiseaux, je me suis trouvée heureuse, très heureuse, et la vie m’est apparue, éblouissante, dans un rayon de soleil.

Cette sensibilité ridicule aux moindres variations du temps et de la température, qui me rend morose quand il pleut, et toute joyeuse dès qu’il fait beau, m’avait valu d’une vieille bonne sœur tourière cet original surnom : le petit baromètre.

Je me suis donc élancée, le cœur en fête, avide de respirer le bon air et pressée de revoir chacun des endroits où j’ai laissé quelque souvenir endormi : je savais bien ne pouvoir