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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/192

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LE JOURNAL

Le maître d’hôtel, grave, solennel, attendait les ordres, insinuant de temps à autre une offre.

— Ces dames prendront des huitres ?… un consommé, peut-être ?… des œufs à la gelée pour commencer. Nous avons du foie gras délicieux. Une petite bête ? cailles, grives, merles de Corse ? Des truffes au madère, très recommandées, une macédoine de fruits pour finir ?

Personne ne l’écoutait : ces messieurs observaient la salle, Jacqueline et la comtesse se regardaient amoureusement, se prenaient les mains, riaient.

Sur un signe du maître d’hôtel, des garçons qui se tenaient derrière lui, immobiles et tout prêts, nous présentèrent sur la table les mets les plus variés. La comtesse s’exclama, avec cet accent slave que je ne puis sentir :

— Allons !… Retirez tout cela, et vite ! Je ne mange rien, vous le savez !… Faudra-t-il toujours vous le répéter !… Que ces gens sont drôles ! Lourdauds ! Ils ne comprennent jamais rien, brutes !

— Madame la comtesse prendra peut-être…

— Mon jus de viande, assurément !

— La même chose, fit Jacqueline.