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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/211

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D'UNE FEMME DU MONDE.

d’hui que nous sommes l’un et l’autre bien au dessus des tentations que je craignais. Notre amour s’épure à mesure qu’il grandit. Il est lui-même contre toute chute notre meilleure sauvegarde.

Venise, 16 mars.

À l’heure où j’écris ces lignes, avant de me mettre au lit, la coupole de Saint-Giorgio Maggiore étincelle aux feux éclatants d’un soleil radieux. Des embarcations de toutes formes et de toutes grandeurs, légères et gracieuses, des barques à voile pareilles à des cygnes majestueux et blancs, de sombres gondoles semblables à des cormorans noirs, sillonnent les flots en tous sens. Le ciel est d’un bleu pur, d’un bleu de roi, qui va palissant vers l’horizon.

Et c’est dans cette clarté d’or et d’azur d’une matinée de mars, sur les côtes enchanteresses de l’Adriatique, que vient de s’évanouir la plus belle nuit de ma vie.

Je rentre à l’instant du bal masqué que donnait la comtesse Branishka. Je veux, avant même de me déshabiller, noter mes