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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/23

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D'UNE FEMME DU MONDE.

gracieuse. Son visage est régulier, d’un profil simple, à l’antique ; sa chevelure est abondante, ses yeux grands, noirs, ombragés par de longs cils qui en adoucissent l’éclat, ses lèvres minces et bien dessinées, et je n’ai jamais vu d’aussi petites mains que les siennes, ni d’aussi jolies. Elle est très élégante, trop élégante pour une jeune fille. Hier soir, elle portait au cou un collier de perles fines et nombre de bijoux sur sa robe. Cela m’a surprise ; à mon avis tant de luxe ne sied pas à une jeune personne de son âge.

Somme toute, ce n’est là qu’une erreur de goût ou de convenance, fâcheuse mais très excusable. Ce qui est bien autrement grave, ce qui m’a choquée, j’allais dire scandalisée, bien que je ne me sache pas prude, ce sont le genre, les manières, le ton et le langage qu’elle a adoptés.

Je me suis laissé dire que tout cela est fort bien. Aujourd’hui, paraît-il, les femmes n’ont rien plus à cœur que d’égaler les hommes, et pour commencer elles en prennent tous les défauts. Elles se « masculinisent » tant qu’elles peuvent et appellent cela du « féminisme ».

Adepte fervente de cette nouvelle école, Jacqueline de Rieux raisonne, pense, parle,