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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/252

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LE JOURNAL.

— Non :

— Mais enfin, qu’avez-vous ? Rien que la façon dont vous me répondez m’inquiète, me révèle l’agitation de votre âme.

— J’ai, murmurai-je, que je pensais… que tout ici-bas a une fin… même les plus grandes amours.

— Raymonde, que dites-vous là ?

— Et je me demandais si notre amour, plus fortuné que les autres, ne se briserait pas un jour comme elles !

— Raymonde ! Vous êtes folle ! Taisez-vous. Qui vous permet de parler ainsi ? Dites, dites, y a-t-il quelque chose ?

Je souris.

— Rien, répondis-je. J’étais folle, vous l’avez dit, mon cher amant. Loin de moi toutes les idées dont un vol noir avait traversé mon esprit. Je vous aime, je vous aimerais aujourd’hui plus encore qu’hier, s’il était possible à l’infini de s’étendre davantage, à la perfection de s’améliorer. Vous me le rendez un peu, je crois. Que cela nous suffise. Ne nous occupons pas des nuages qui plus tard pourront obscurcir l’horizon, si tant est qu’il y en aura : ne voyons que le coin de ciel bleu sous lequel nous vivons.