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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/288

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LE JOURNAL.

comme je voulais qu’elle fût un jour la femme forte, à l’abri des tentations, ou tout au moins capable de les vaincre, capable de marcher, fière et sûre d’elle-même, parmi les hontes et les ignominies, dont est semé le chemin de la vie.

Mon rêve, jusque-là si limpide, s’assombrit tout d’un coup.

Il était arrivé, pour ma pauvre chère Raymonde, comme jadis pour moi, cet instant critique, d’où dépend la destinée tout entière d’une femme, et qui fut le commencement de mes malheurs.

Raymonde était en âge d’être mariée. Elle avait la beauté, la grâce, la naissance et la fortune : aussi des multitudes de gens se présentaient-ils ; ils se la disputaient ; tous la voulaient avoir : la plupart en étaient indignes.

Comment découvrir parmi cette foule de courtisans, hypocrites et fourbes, d’hommes à la chasse d’une dot et d’une situation dans le monde, comment découvrir, en admettant qu’il s’y trouvât, le garçon de cœur, honnête et loyal, entre les mains duquel je pusse, en toute sécurité, remettre le trésor que j’ai reçu du ciel.