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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/32

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LE JOURNAL

— Qu’est-ce que j’ai dit de mal ? N’est-il pas tout naturel que je désire voir de près des personnes que, depuis deux ans, je lorgne de loin à l’Opéra. Quand je peux, encore ; car maman me dit tout de suite : « Jacqueline, ne regarde pas ainsi cette dame, ce n’est pas poli. » Dire que je les connais toutes de nom, ces femmes-là !

— Est-ce possible !

— Oh ! rassure-toi : c’est dans le Gil Blas de mon frère que je les ai appris. De temps en temps il me les fait répéter.

— Qui ?

— Gaston, parbleu ! Ça l’amuse, et puis il prétend qu’il vaut mieux, pour une femme, les apprendre avant qu’après le mariage. Je connaîtrai enfin Liane de Castel-Sarrasin.

— Qui çà ?

— Ma belle-sœur de la main gauche. Un chic nom, hein ! Ces femmes-là sont épatantes, elles ne doutent de rien. Il paraît qu’elle n’est pas mal, un peu fanée cependant : c’est un ami de Gaston qui m’a donné ce tuyau là. Elle a des chevaux merveilleux. Je crois même savoir quel en est le donateur. Papa disait l’autre jour à Gaston : « Est-ce que tu es fou de payer des paires de chevaux de ce