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le miroir, autant de fois sa chaleur sera plus puissante que celle du miroir. » Il avait encore écrit ailleurs ce passage[1] : « Une même vertu est d’autant plus puissante qu’elle occupe une plus petite place. Ceci s’entend pour la chaleur, pour la percussion, pour le poids, pour la force et pour beaucoup d’autres choses. »

« Nous parlerons d’abord de la chaleur du soleil, qui s’imprime dans le miroir concave et en est réfléchi en figure pyramidale, pyramide qui acquiert proportionnellement d’autant plus de puissance qu’elle se resserre plus. C’est à dire que si la pyramide frappe l’objet avec moitié de sa longueur, elle resserre la moitié de son épaisseur dans le bas ; et si elle frappe aux 99 centièmes de sa longueur, elle se resserre des 99 centièmes de sa base et croît des 99 centièmes de la chaleur que reçoit la base de la dite chaleur du soleil ou du feu. »

On peut rapprocher également, quoique d’une manière moins intime, la réponse donnée par Cardan[2] à cette question : « Comment sont causées les couleurs de l’arc céleste dit Iris » avec ce que Léonard a écrit de l’arc-en-ciel[3].

Mais, en une foule d’occasions, Cardan n’hésite pas à s’écarter de son illustre devancier ; au sujet des marées, de la scintillation des étoiles, de la suspension des nuages dans l’atmosphère, il adopte des solutions distinctes de celles qu’avait proposées Léonard ; sa théorie de la chaleur, du feu et de la force élastique des gaz est bien à lui ; et c’est peut-être la partie la plus remarquable des livres De la Subtilité.

Cardan ne fut donc pas un vulgaire plagiaire ; il sut

  1. Les Manuscrits de Léonard de Vinci, publiés par Ch. Ravaisson-Mollien ; Ms. G de la Bibliothèque de l’Institut. fol. 89, verso. Paris, 1890.
  2. Cardan, Les Livres de la Subtilité, traduis de latin en françois par Richard Le Blanc. Paris, l’Angelier, 1556, p. 83.
  3. Les Manuscrits de Léonard de Vinci, publiés par Ch. Ravaisson-Mollien ; Ms. F de la Bibliothèque de l’Institut. fol. 67, verso. Paris, 1889.