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une descente au monde sous-terrien

encensé du matin au soir si vous voulez, mais sollicité aussi, en butte aux entreprises de tous les aigrefins, vivant dans un tourbillon au sein duquel il m’aurait fallu renoncer à toute affection sincère et désintéressée. J’ai eu peur, car ici, parmi tous ces braves gens, je m’étais accoutumé déjà à être aimé pour moi-même, et à une gratitude que n’avilissait aucun motif d’intérêt.

— En outre, l’or et les gemmes n’ont qu’une valeur conventionnelle : celle que nous leur attribuons. En marchant dessus toute ta journée, je finissais par me persuader que c’étaient des cailloux comme tous les autres. J’ai retardé, j’ai atermoyé, j’ai reculé le voyage au cours duquel je devais éblouir les hommes supérieurs, et de fil en aiguille j’ai oublié de les éblouir. Ils ne s’en portent pas plus mal, et moi non plus. Vous voyez qu’en tout ceci la haute vertu n’avait pas à intervenir.

— Monsieur le Président, vous êtes la modestie même, dit Francken, et je ne vous ferai plus de compliments, puisque vous ne voulez pas qu’on vous en fasse. Mais je vais vous demander quelques renseignements, pour mon édification personnelle. Oh ! rassurez-vous ! j’ai renoncé à l’idée d’écrire quoi que ce soit, en remontant sur la terre. Et je pourrais ne pas vous avoir promis le secret que ce serait la même chose ; ces gens-là sont trop heureux dans leur isolement pour que je commette le crime de les faire connaître. Qu’avez-vous fait pour améliorer leur sort ?

— Peu de chose. Deux choses. Je leur ai donné des armes, comme vous le savez, pour se défendre des Kra-las, et un moyen de mesurer le temps, de savoir leur âge, et de se dis-