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une descente au monde sous-terrien

La grève était morne et désolée ; elle présentait parfaitement l’aspect des terres qui n’ont jamais été habitées, et qui ne le seront sans doute jamais. Derrière, régnait une succession de dunes absolument nues, et qui s’éloignaient jusqu’à l’infini comme un énorme moutonnement fauve. La partie lugubre de l’aventure allait commencer. Le désert, dans lequel on pénétrait maintenant, méritait son nom mieux qu’aucun autre ; il était bien certain, dès le premier coup d’œil, qu’on n’y trouverait ni un brin d’herbe, ni une goutte d’eau, ni une créature vivante. C’était l’empire de la solitude et de la mort ; c’était un espace incommensurable où la nature avait été vaincue, où il lui avait été impossible de mettre de la vie, malgré sa merveilleuse facilité de création.

Les dangers allaient se montrer aussi ; jusqu’à présent, les difficultés à vaincre n’avaient pas été bien grandes, et les périls avaient été nuls. Mais il allait falloir compter avec la faim, avec la soif, avec les sables mouvants, avec l’inconnu et avec la tempête. Et ceci non pas pendant un jour, non pas pendant quelques jours, mais pendant le temps qu’il faudrait, sur la terre, pour aller par étapes de Tombouctou en Laponie.

C’est pour y arriver qu’on avait emmené vingt mastodontes. Les énormes bêtes, seules, étaient capables de transporter les radeaux démontés, les provisions, les armes, les munitions, l’eau et les hommes par-dessus le marché.

Nos éléphants, quelque puissants qu’ils soient, ne seraient jamais venus vivants au bout d’un pareil voyage. Il y fallait la taille des monstres antédiluviens, et leur force prodigieuse.