Page:Pierre Luguet Une descente au monde sous-terrien 1909.djvu/87

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

81
une descente au monde sous-terrien

une sombre journée de tempête, pour savoir ce qu’il peut éveiller d’angoisses et faire naître de craintes dans les cœurs les plus courageux. Un homme à la mer, dans la brume, dans l’écume, dans l’écroulement irrésistible des lames, dans le bruit assourdissant de l’eau qui bouillonne, c’est presque toujours la perte d’une existence humaine, la lutte désespérée d’un malheureux contre la mort, et son abandon aux monstres de l’Océan. La manœuvre qu’il faut faire pour retrouver un homme à l’eau est longue et délicate. Le navire est lancé ; il lui faut du temps pour s’arrêter, faire route en arrière, et rencontrer le point exact où l’accident a eu lieu. Et quand c’est fait, souvent, le naufragé a déjà osé toutes ses forces ; il a coulé ; on ne le reverra plus.

Au cri de : « Un homme à la mer », tout le monde, à bord du Pétrel, s’agita. Le capitaine saisit sa jumelle, et se mit à étudier la surface de l’Océan. Plougonnec compta ses hommes, pour savoir lequel manquait.

Et, à l’instant même, Jean Kerbiquet commandait :

— Une baleinière et quatre hommes !

Le maître d’équipage lui criait, d’en bas :

— Capitaine, je ne sais pas qui ça peut être. J’ai tout mon monde.

— Votre prisonnier ?

Plougonnec se précipita.

— Il est là, capitaine.

Le problème devenait embarrassant. D’où pouvait bien sortir cet inconnu, qu’on voyait distinctement flotter sur la mer, et qui, d’ailleurs, n’avait pas le moins du monde l’air d’être en détresse, puisqu’il ne manquait personne à bord