Aller au contenu

Page:Pierre de Coubertin - Anthologie, 1933.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
15
sport et pédagogie

vant, mais l’onde la plus douce et la plus calme n’enlève pas au sport le caractère combatif qui est son essence et fait son charme.

La bataille que le nageur livre au flot, l’alpiniste la livre à la montagne. On s’en aperçoit rien qu’à surprendre le regard dont il la mesure d’en bas avant de commencer à en gravir les pentes. En effet, sous son masque impassible, elle va se défendre contre lui comme un adversaire vivant, l’égarant, le mystifiant, lui opposant une série déconcertante d’obstacles : rochers à escalader, pentes neigeuses à parcourir. Et ce ne sont là que des préliminaires. Elle tient en réserve pour le perdre d’épais brouillards qui l’envelopperont, des crevasses profondes qui s’ouvriront sous ses pas, de lourdes avalanches qui chercheront à l’entraîner dans leur chute foudroyante ; elle tentera de le terrasser par le vertige, par la bise, par le froid, et lui ne vaincra que par une virile combinaison d’énergie bien employée, de sang-froid voulu et de ferme prudence. Certes, c’est bien là une bataille et de la catégorie la plus moderne, de celles que gagne la stratégie et non la fougue…

Revue des Deux Mondes, 1er Juillet 1900.

La Conscience.

La conscience existe sous trois types, toujours les mêmes. Elle est endormie : c’est le cas de la majorité ; ou bien elle est dévoyée : c’est la trop nombreuse exception ; ou bien elle est alerte : c’est l’élite.

Il est ingénieux de comparer la conscience à un tribunal puisqu’elle provoque un interrogatoire et un jugement. Mais il faut alors l’entourer de tout ce qui est nécessaire au bon fonctionnement d’un tribunal : à savoir — en plus de l’interrogatoire et du jugement — l’instruction, les plaidoiries et le réquisitoire.

Le sommeil de la conscience est celui d’un tribunal auquel on aurait longtemps négligé d’avoir recours et dont le juge complètement assoupi ne serait plus capable d’entendre la plainte du demandeur…

… L’homme n’est pas pour celà garanti contre tous remords. S’il se prépare à mal agir, un vague malaise l’en avertit. Quand il a mal agi, une sourde inquiétude le tourmente. Mais les rouages