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le roman d’un rallié

ses quinze ans, que la marquise de Crussène lui avait dévoilé, en quelques paroles, le triste secret et elle avait ajouté — il croyait l’entendre encore : « Mon enfant, tu n’as peut-être pas remarqué que le 30 octobre, jour anniversaire de la naissance de Monsieur de Lesneven, est pour moi, chaque année, l’occasion d’un jeûne auquel tu pourras désormais t’associer, si tu le veux ; mais je ne t’y force pas ; de tels souvenirs ne sont pas faits pour ta jeunesse et je comprendrai que tu te refuses à les partager ». Néanmoins, Étienne avait jeûné de bonne grâce chaque fois que, depuis lors, il s’était trouvé à Kerarvro le 30 octobre. À vrai dire, il préférait n’y pas être : ce jeûne le choquait : il se fut volontiers rendu à l’église. Mais la marquise ne faisait point célébrer de service anniversaire ; on ne pouvait prier pour Monsieur de Lesneven puisqu’il était tombé dans la damnation éternelle.

Sur la terrasse de marbre, l’ombre du Capitole se retirait peu à peu ; les oiseaux continuaient de jaser dans les arbres du Smithsonian et le Potomac, de rouler ses flots d’or. Étienne revoyait