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Page:Pierre de Coubertin - Hohrod - Roman d'un Rallié, 1902.djvu/81

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le roman d’un rallié

si bien élevée et en train tout à la fois ! Le ciel porte une toilette azurée que recouvre un tulle léger, tout pailleté de lumière ; la brise retient la vigueur de son souffle ; des oiseaux vont et viennent dans les hauteurs atmosphériques, traçant de joyeuses fusées… et dans le cœur d’Étienne, le conte de fée continue. Il interprète les sentiments des bêtes et des plantes, de l’air et de l’eau ; leur langage lui est familier. Il a perdu de vue l’humanité. Les quelques voyageurs qui se sont embarqués avec lui ce matin, au wharf de la septième rue, sur le petit vapeur d’Alexandria, ne troublent point sa rêverie. Il les oublie comme il oublie les vilaines rues du quartier nègre, la promiscuité du tramway et le wharf lui-même, encombré de cordages et de ballots et imbibé de goudron.

À présent, Washington a disparu. Le dôme blanc du Capitole apparaît seul, demi-cercle éblouissant, au-dessus des forêts qui bordent la rive. Ces forêts ont l’air dense et primitif ; la végétation y a une puissance et un coloris qui surprennent l’Européen, habitué à de chétifs