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Page:Pierre de Coubertin - L’Éducation anglaise en France, 1889.djvu/125

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sous les ombrages de juilly

et des cloîtres je ne sais quelle tristesse d’exil ; la vie se montre à toutes ces jeunes imaginations comme un temps d’épreuve que l’on peut adoucir en ayant constamment les yeux fixés hors de ce monde ; on leur en dévoile tout le néant et on les amène au secret désir d’en sortir le plus vite possible : comme carrière on leur propose l’armée et l’on fait revivre à leurs regards le moine-guerrier du moyen âge, ou bien le sacerdoce et on leur donne à entendre que là seulement ils trouveront le bonheur ; de la science et de ses applications industrielles et commerciales qui font la gloire de notre siècle, pas un mot. La conséquence pratique de ce dédain qu’on leur inspire pour la vie, c’est de leur inspirer aussi le mépris du corps ; celui qui en prend soin devient pour eux « un jeune voluptueux » et quelques-uns se prennent à admirer le bienheureux Labre. Au lieu que le corps soit l’agent et le compagnon de l’âme, il n’est plus qu’un vil esclave destiné à être contrarié et délaissé ; il est à remarquer pourtant que, le sans-soin étant la tendance naturelle de tous les êtres humains, on en arrive vite à ne plus en souffrir soi-même, mais à en faire souffrir les autres Ce vieux Malebranche ! il est bien un peu coupable de toutes ces faussetés ; n’a-t-il pas lui aussi enseigné le mépris de cette guenille et n’est-il pas pour quelque chose dans le peu de cas qu’on en a fait si longtemps ?