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nos lycéens

nera de leur chemin ; mais s’ils ont leur journée inoccupée, de mauvais camarades et un peu de précocité malsaine, ils sont perdus.

« Nous ne sommes pas d’une génération robuste, confesse un chroniqueur (Journal des Débats, 8 juin), et pourtant nous avons fait beaucoup de gymnastique dans notre enfance : deux fois la semaine un ancien pompier venait au collège ; on descendait aussitôt après le dîner de midi dans la cour des grands ; le terrible homme nous attendait entre deux gardes-chiourme qu’il appelait ses sous-maîtres : il nous faisait aligner, en nous interpellant avec la brutalité d’un soldat qui n’a pas appris le latin et qui s’en console en s’en glorifiant. Il était le plus dur de nos maîtres dans sa peur qu’on le prît pour un inférieur. Et en effet les élèves, à partir de la troisième, le dédaignaient un peu ; ils affectaient de le traiter comme les stoïciens antiques traitaient la Fatalité, en la subissant, mais sans se commettre à raisonner avec lui. Par malheur il avait des moyens tout matériels de nous faire sentir son autorité ; il n’avait cure de nos dédains ; il passait outre et nous nous lassions avant lui comme s’il avait été la Fatalité justement. S’accroupir, se lever, tendre un bras, piaffer sur place, tout cela au commandement, puis manœuvrer des haltères, des poids, enfin grimper dans les agrès, non comme des écureuils, mais comme des pantins