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souvenirs d’amérique et de grèce.

j’avais présenté mon idée en premier lieu, on l’avait accueillie avec sympathie. Les Américains portent allègrement le fardeau du passé ; ils se sentent assez jeunes et assez forts pour en hériter totalement ; leur siècle ne craint point la comparaison avec les siècles disparus : ils le jugent grand et beau. Pourquoi donc les Jeux Olympiques modernes demeureraient-ils inférieurs aux Jeux Olympiques anciens ? L’Angleterre, dont je tentai ensuite de me concilier les faveurs, estime que la culture de la vigueur et de l’agilité corporelles est devenue l’apanage exclusif de ses fils,… son acquiescement fut sceptique, presque railleur. Cela se passait à l’automne de 1893 et dans les premiers mois de 1894 ; au printemps de cette année-là, le Congrès Olympique s’ouvrit à la Sorbonne.

La séance d’ouverture ne fut point banale. Elle eut lieu dans le grand amphithéâtre qu’inaugura en 1889 le Président Carnot, entouré par les délégations enthousiastes des étudiants de tous les pays et où, plus tard, les représentants de la science universelle célébrèrent le jubilé de Pasteur. Sur la pierre blanche se détache la fresque de Puvis de Chavannes : le maître a représenté, dans le bois sacré qu’emplit un crépuscule divin, l’effort auguste de la pensée humaine vers la lumière et la vérité. C’était la première fois qu’un congrès athlétique se tenait en ce lieu. M. le recteur Gréard n’avait point pensé qu’il y fût déplacé. Il y avait là d’ailleurs les délégués du gouvernement, des membres de l’Institut, des savants, des artistes. Après les discours du baron de Courcel, président du Congrès, et du poète Jean Aicard, des