Aller au contenu

Page:Pierre de Coubertin - Souvenirs d Amerique et de Grece, 1897.djvu/118

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
111
la préface des jeux olympiques.

Mars, ni la fréquentation des Thermes, ni plus tard les bestialités du Cirque n’ont de rapport avec l’athlétisme grec. Tout diffère : tendances et formes.

Le gladiateur a rabaissé et tué l’athlète. En même temps s’opère une révolution religieuse qui divise le monde en deux camps et dresse en face de l’idéal antique un autre idéal, selon lequel l’esprit a pour mission de contrarier la chair, de la meurtrir. La gymnastique participe de la haine qui s’exerce contre toutes les institutions du paganisme. On la proscrit ; pour un peu on lui découvrirait une origine diabolique. Il est dangereux pour l’homme, dit-on, de s’occuper de son corps ; c’est l’embûche par excellence que lui tend l’esprit malin ; s’il y cède, le vice est sur lui et sa mort morale est consommée. Ces idées-là, notez-le bien, ont été admises universellement et elles pèsent sur nous de tout le poids des siècles qui les ont mises en pratique. L’inertie musculaire a peut-être cessé d’être le critérium de la vertu ; mais on la considère encore comme une condition indispensable de l’activité cérébrale et cela revient au même. Il y a eu en plein moyen âge un retour de l’esprit athlétique ; c’est la chevalerie. Cette veillée des armes qui précédait la fête toute de joie et d’activité physiques par laquelle le jeune chevalier inaugurait sa vie nouvelle c’est peut-être ce qui, depuis quinze cents ans, a le plus ressemblé aux Jeux Olympiques ; et rien ne prouverait mieux, si besoin en était, combien peu l’athlétisme et le paganisme furent liés l’un à l’autre. Lui aussi, le jeune Grec passait le dernier soir dans la solitude et le recueille-