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Page:Pierre de Coubertin - Souvenirs d Amerique et de Grece, 1897.djvu/155

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souvenirs d’amérique et de grèce.

le Stade, aux sons des musiques qui jouaient l’hymne grec, cette harmonie en laquelle semblent se fondre les énergies du Nord et les douceurs de l’Orient. La reine était vêtue de blanc : le roi portait l’uniforme. Quand il eut pris place au fond de l’hémicycle dans son fauteuil de marbre, il fut harangué par le Prince Royal. Alors, se levant, il proclama l’ouverture de la première olympiade. Des chœurs montèrent aussitôt vers l’azur prolongeant, en quelque sorte, cette minute solennelle et lui donnant sa véritable signification historique. Les modes ont bien des fois varié depuis deux mille ans : la musique est demeurée ce qui traduit le mieux l’émotion d’une foule, ce qui accompagne le mieux l’ampleur d’un grand spectacle. Tout ce que les assistants devaient éprouver à l’inauguration du Stade, l’artiste grec Samara avait su le prévoir ; sa mélodie l’exprimait admirablement. L’ode olympique symbolisa l’allégresse populaire, ratifiant les paroles graves échangées entre le souverain et son fils. On voulut l’entendre une seconde fois et les applaudissements qu’elle souleva, se mêlèrent à ceux qui saluèrent l’entrée des athlètes. Ils débouchèrent de ce même souterrain, sous lequel avait disparu jadis la silhouette du dernier concurrent chassé par la décadence et maudit par l’Église. Ce jour-là, sans doute, il faisait morne dans le Stade ; entre les marbres l’herbe poussait déjà ; les spectateurs étaient clairsemés : quelques humbles, de ceux qui n’ont rien à perdre, venus pour protester contre les tendances nouvelles et affirmer leur attachement inébranlable aux traditions. Peut-être même la réunion fut-elle