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des dangers de l’avenir. Cette formidable puissance financière correspond, cela va sans le dire, à un despotisme moral plus grand encore. Les Canadiens-Français sont les humbles esclaves de leur clergé et de leurs congrégations, et s’il est juste de dire que le clergé et les congrégations sont à l’abri de toute attaque en ce qui concerne les mœurs et la vénalité, il est également juste d’ajouter qu’ils dirigent la politique assez mal et qu’ils enchaînent les esprits en prétendant les guider. Leur domination pèse lourdement sur une partie de la population que les travaux de la terre ne suffisent plus à charmer, et qui prendrait volontiers sa part du mouvement littéraire et scientifique universel. Cette issue lui est fermée et c’est alors vers l’activité commerciale et financière qu’elle se tourne. On fait des affaires, au Canada, ou plutôt l’on rêve d’en faire, car l’on n’y parvient guère ; c’est là le débouché de l’intelligence et les Canadiens sont bel et bien des coureurs de dollars. Leur littérature est en enfance, leur presse est incolore ; mais ils savent calculer, supputer, escompter à la façon du paysan normand, dont ils ont les instincts aussi bien que l’accent.