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HYMNES HOMÉRIQUES.

une place pour s’y bâtir un temple. Une nymphe de Béotie, Telphuse, lui conseille de s’établir à Crissa, sur le flanc du Parnasse. C’était un piège qu’elle lui tendait malicieusement ; car elle savait qu’un serpent terrible avait son repaire dans cette contrée, et que le dieu y courrait de grands dangers. Apollon suit le conseil de la nymphe : il bâtit son temple dans la solitaire vallée de Crissa. Mais il tue le monstre ; et, pour punir la perfidie de Telphuse, il fait disparaître, sous un éboulement de rochers, la fontaine à laquelle la nymphe présidait. Apollon se transforme en dauphin, et guide vers Crissa un navire monté par des Crétois de Cnosse. Ces Crétois, à l’invitation du dieu, y fixent leur séjour, et ils deviennent les prêtres et les gardiens du nouveau sanctuaire.


Hymne à Mercure.


L’Hymne à Mercure n’a rien de cette gravité religieuse qui distingue les deux hymnes à Apollon. C’est une sorte de conte presque plaisant, écrit à la manière du récit des amours de Mars et de Vénus dans l’Odyssée. On voit, à l’enjouement du poëte, qu’il n’a nullement la prétention de faire le prêtre et l’hiérophante, et qu’il s’agit uniquement pour lui de vers et de poésie. Le Mercure qu’il chante est un nouveau-né. Mais cet enfant merveilleux quitte son berceau, et s’en va dans la Piérie voler les bœufs d’Apollon. Il les conduit dans une grotte près de Pylos, en dérobant sa marche par d’adroits stratagèmes ; puis, comme un sacrificateur consommé, il égorge et dépèce deux victimes, et il en fait un solennel hommage aux différents dieux. Il avait rencontré en son chemin une tortue : cette tortue, entre ses mains industrieuses, était devenue une lyre. Il se sert de l’instrument nouveau pour apaiser Apollon, qui a deviné le voleur de ses bœufs ; et les deux fils de Jupiter contractent ensemble une étroite intimité. L’hymne, bien qu’un peu long, est agréable à lire ; l’esprit y pétille, mais discrètement. C’est de la poésie gracieuse, mais ce n’est guère plus que l’Hymne à Apollon Pythien une œuvre de génie. Ces deux morceaux sont à peu près contemporains. La lyre dont il est question dans l’Hymne