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CHAPITRE VIII.

Athéniens dans de nouvelles élégies, et il n’hésita point à répéter tout ce qu’il pensait du personnage tout puissant. Solon était vieux alors. Comme on ne cessait de l’avertir que Pisistrate pourrait bien lui faire un mauvais parti, il répondait que sa vieillesse lui permettait de ne pas craindre la mort. Il n’y a rien dont on doive plus regretter la perte que des poëmes où se rencontraient ces éloquentes invectives : « Si vous endurez ces maux par votre lâcheté, n’accusez pas les dieux de votre malheur. Ces hommes, c’est vous qui les avez faits si grands, en leur donnant ces appuis ; et voilà pourquoi vous êtes dans ce honteux esclavage… Vous ne regardez qu’à la langue, qu’aux paroles d’un homme artificieux ; mais vous ne voyez nullement la façon dont il se gère… Chacun de vous en particulier marche sur les traces du renard ; mais, réunis, vous n’êtes qu’une troupe imbécile. »

Pisistrate, homme d’esprit avant tout, ne s’offensa pas de la franchise du vieillard ; il finit même par le désarmer à force de déférence et de respects. Il n’innova rien dans les institutions, content de posséder la réalité du pouvoir, et de diriger à son gré la marche des affaires. Cette soumission aux lois établies fut sans doute la flatterie la plus sensible au législateur. Solon passa ses dernières années dans un repos profond, tout entier aux études libérales, à la poésie, et aux plaisirs que lui permettait son grand âge. C’est de cette époque probablement que datent ces vers où il avait consigné, à l’usage de ses contemporains, les notions scientifiques qu’il avait puisées dans le commerce des sages, dans les livres, dans la contemplation de la nature, et dont Plutarque et d’autres citent des échantillons. Le vers fameux : « Je vieillis en apprenant toujours davantage, » témoigne de l’ardeur qui l’animait dans ses recherches savantes.


Élégie morale ; poésies diverses de Solon.


On ne peut pas rattacher à une circonstance particulière de sa vie la magnifique élégie qui commence par une invocation aux Muses, la seule que nous possédions dans un état parfait d’intégrité. Cette élégie est toute morale. Après avoir