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CHAPITRE XV.


CHAPITRE XV.

PREMIÈRES COMPOSITIONS EN PROSE.


Pour quelle raison les Grecs ont écrit si tard en prose. — Législateurs. — Zaleucus. — Phérécyde de Scyros. — Anaximandre et Anaximène. — Héraclite. — Anaxagore. — Autres philosophes. — Logographes. — Cadmus de Milet et Acusilaüs. — Hécatée de Milet. — Phérécyde de Léros, Charon et Hellanicus.

Pour quelle raison les Grecs ont écrit si tard en prose.


Une chose qui semble fort extraordinaire au premier abord, c’est le peu d’usage que les Grecs ont fait de la prose, jusque vers le commencement du cinquième siècle avant notre ère. Durant les périodes les plus florissantes de leur poésie, ils n’écrivaient, dans la langue parlée, que ce qui n’eût pas souffert aisément les lois du rythme et de la prosodie. Mais la poésie suffisait à tous les besoins. C’est elle qui conservait, en les embellissant, les traditions de la gloire nationale ; c’est elle qui gravait dans les âmes les prescriptions de la règle des mœurs, et qui montrait, comme dit Horace, la route de la vie ; c’est elle qui transmettait de génération en génération les secrets des arts et de la science, les découvertes de l’expérience ou de hasards heureux. Les oracles s’exprimaient en vers ; les prêtres étaient des poëtes, et les législateurs eux-mêmes essayèrent quelquefois de donner la forme poétique à leurs constitutions et à leurs codes. Quelques inscriptions, des textes de traités de paix, des décrets politiques, des articles de lois, tels sont, peu s’en faut, les seuls monuments de la prose grecque, du neuvième au sixième siècle ; monuments précieux pour l’archéologie et la grammaire, mais où l’histoire de la littérature n’a rien ou n’a que peu de chose à voir.