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CHAPITRE XXII.

ton lui envoya les comédies d’Aristophane. Mais Platon lui-même n’était pas exempt de préjugés politiques. Comme Aristophane, il détestait la démocratie : il n’est donc pas très-surprenant que la caricature ait eu à ses yeux les traits d’un tableau véritable, et qu’il l’ait donnée pour telle au tyran. Quant à nous, que rien n’aveugle plus sur les mérites ou les défauts des personnages joués par Aristophane, et qui n’aspirons point à réformer les mœurs et les institutions des Athéniens, nous ne devons accepter les renseignements fournis par le poëte satirique, que sous bénéfice d’inventaire. Même avec ces réserves, il reste beaucoup à puiser dans ses œuvres, et l’histoire peut se féliciter, elle aussi, de l’heureux hasard qui en a préservé une portion si considérable. Le temps a traité Aristophane avec autant de faveur, peu s’en faut, qu’Euripide même. De cinquante-quatre comédies, ou, selon d’autres, de quarante-quatre seulement, il nous en reste onze, et qui se sont conservées jusqu’à nous dans un parfait état d’intégrité. Ces onze comédies, ou, si l’on veut, ces onze satires, se peuvent partager en groupes, à peu près comme il suit : satires politiques, les Acharniens, les Chevaliers, la Paix, Lysistrate ; satires philosophiques, les Nuées, les Guêpes, l’Assemblée des Femmes, Plutus ; satires littéraires, les Fêtes de Cérès, les Grenouilles. Une seule pièce, les Oiseaux, ne rentre dans aucun de ces trois groupes. C’est une sorte de revue critique où tout est mêlé, politique, philosophie, littérature, mille choses encore, et dont le but n’est pas très-nettement indiqué. C’est de la fantaisie, bien plus que de la polémique ; c’est de la poésie qui ne vise guère qu’à être de la poésie et à charmer l’imagination des hommes.


Comédies d’Aristophane.


Aristophane est un partisan de la paix, et même de la paix à tout prix. La guerre suscitée, selon lui, par Périclès, et que la mort de Périclès n’avait point suspendue, ne pouvait aller à ses goûts. Il essaya, en 426, de ramener ses concitoyens à des sentiments plus calmes, et de leur démontrer qu’un bon accommodement avec les ennemis était préférable