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CHAPITRE III. LES RHAPSODES.

transcrire ainsi son expression ; et il dit, au moins une fois, phormiser avec la cithare.

Il n’est nulle part question de la lyre dans les poëmes d’Homère. L’Hymne à Mercure, où l’on trouve la lyre mentionnée pour la première fois, est bien postérieur à l’Iliade et à l’Odyssée, et c’est à tort qu’on l’attribue au chantre d’Ulysse et d’Achille. La lyre n’était autre chose d’ailleurs que la cithare ou la phorminx perfectionnée : elle avait aussi deux branches, mais moins recourbées que celles de l’instrument primitif ; et sa boîte, au lieu d’être plate et rectangulaire, était arrondie en forme de bouclier, et renflée dans son épaisseur comme la carapace d’une tortue. Les mots qui en grec et en latin signifient tortue, sont même des synonymes poétiques de la lyre. La lyre eut d’abord quatre cordes seulement ; plus tard Terpandre lui en donna sept : il est probable, par conséquent, que le luth des aèdes était à peine un instrument tétracorde. Mais cet instrument, si simple qu’il fût, répondait à peu près aux besoins du chant, qui ne fut guère, pendant longtemps, qu’une récitation rythmée, une déclamation musicale. {brn|1}}

Récitations poétiques.


Les aèdes charmaient les hommes et par leurs inventions poétiques, et par leur débit harmonieux, et par les accords de la phorminx et de la cithare. Souvent ils ne faisaient qu’improviser, par exemple dans les luttes entre aèdes rivaux, et ils abandonnaient aux vents les paroles volantes. Mais souvent aussi leurs chants étaient de véritables compositions, longuement élaborées à l’avance, et qui ne périssaient pas avec l’instant de la récitation. L’aède reproduisait vingt fois un sujet favori, ou devant des auditoires divers, ou devant le même auditoire, qui le redemandait. Ce chant était bientôt dans toutes les mémoires. Rien n’empêchait qu’il ne se conservât, même de la sorte, pendant des siècles, et qu’il ne se transmît plus ou moins intact, plus ou moins altéré, jusqu’à la postérité lointaine. La collection des chants enfantés par le génie des aèdes était comme un trésor grossissant de génération en génération ; et les applaudissements du public