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CHAPITRE XLII.


Denys d’Halicarnasse.


Nous possédons, du moins en partie, l’Histoire ancienne de Rome par Denys d’Halicarnasse. Cet ouvrage embrassait toute la période qui s’étend depuis la fondation de Rome jusqu’à la première guerre Punique, et finissait par conséquent au point même où commence celui de Polybe. Denys était venu se fixer à Rome après la bataille d’Actium, pour étudier la langue latine, et pour préparer les matériaux nécessaires à l’exécution de son dessein. Il y fit un long séjour ; et c’est là qu’il écrivit et publia son Histoire, fruit de vingt-deux ans de recherches. Des vingt livres qu’avait cet ouvrage nous possédons les onze premiers, ainsi qu’un certain nombre de fragments des neuf autres, retrouvés pour la plupart dans ces derniers temps par Angelo Mai.

Denys d’Halicarnasse présente les Romains comme un peuple d’origine grecque ; et c’est la Grèce qui leur a fourni, à l’entendre, leurs mœurs, leur culte, leurs institutions. Il conclut sans cesse de l’analogie plus ou moins réelle à l’imitation directe ; souvent même il lui arrive de voir des concordances là où il n’y a que des contrastes. On conçoit qu’une pareille préoccupation ne pouvait manquer de le jeter dans de graves erreurs. Ce n’est donc pas un guide auquel on se puisse fier, surtout dans les questions d’origines. Il a d’ailleurs altéré à plaisir la vérité de ses récits en prêtant à ses personnages, même aux êtres quasi fabuleux des temps héroïques, des discours d’une prolixité révoltante, et qui n’ont guère d’autre but que de faire admirer aux amateurs son habileté à manier la langue oratoire. Cependant il y a quelques parties traitées avec simplicité, des morceaux intéressants et où le goût n’a pas trop à reprendre ; et le style, assez recherché en général, se détend quelquefois et ne sent pas toujours le rhéteur.

Rollin, qui fait un grand éloge de Denys, est bien forcé d’avouer que son mérite principal est d’être un utile magasin de documents. Il critique même assez vivement l’opinion d’un traducteur de l’Histoire ancienne de Rome, qui mettait sans façon Denys sur la même ligne que Tite Live. Il mon-