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CONTEMPORAINS D’AUGUSTE, ETC.

toute sorte de sujets. Ils faisaient des harangues politiques du genre de celles dont parle Juvénal : ils donnaient à Sylla le conseil d’abdiquer la dictature, ou ils exhortaient les Athéniens, comme fait Lesbonax, sophiste contemporain de Tibère, à s’armer de courage contre les ennemis dans la guerre du Péloponnèse. Ils dissertaient sur des questions morales ou même scientifiques, mais en s’attachant presque uniquement au bien dire, et avec peu de souci de la vérité pure et même du bon goût. En un mot, c’était Gorgias, c’était Protagoras ; c’étaient même quelquefois des triomphes oratoires comparables à ceux qui avait jadis allumé la sainte indignation de Socrate. Il va sans dire que la plupart de ces orateurs qui faisaient tant de bruit ne méritaient nullement leur réputation. Il faut pourtant faire exception pour quelques-uns ; et, sans parler de Plutarque et de Lucien, qui furent des hommes de génie, plusieurs de ces sophistes étaient mieux que de vides déclamateurs, et méritent une place dans l’histoire de la littérature.


Dion Chrysostome.


Le plus célèbre des sophistes du siècle dont nous énumérons les écrivains est Dion, qui fut nommé Chrysostome, c’est-à-dire bouche d’or, à cause de son éloquence. Il était né à Pruse en Bithynie, et il florissait à Rome dès le temps de Néron. Lorsque Vespasien parvint à l’empire, Dion lui conseilla de rétablir la république. Impliqué plus tard dans une conspiration contre Domitien, il s’enfuit loin de l’Italie. Il était sur les bords du Danube quand on y reçut la nouvelle de la mort de l’empereur et de l’élection de Nerva. L’armée campée dans ces parages allait se révolter : Dion, qui était dans le camp, mais déguisé en mendiant, se fait connaître, harangue les soldats, les ramène à l’obéissance ; et Nerva est proclamé d’une voix unanime. Dion jouit d’une grande faveur sous Nerva et sous Trajan, et mourut dans un grand âge, avec le renom du premier des orateurs et des écrivains du temps.

C’était un homme, en effet, d’un talent très-distingué, si-