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Page:Pilard - Deux mois à Lille par un professeur de musique, 1867.djvu/22

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seigné car il s’en fallait de peu que l’ouvrage tombât dans l’obscénité. Aussi, sans attendre la fin de l’acte, je sortis de la salle me proposant de n’y rentrer que pour la seconde pièce annoncée sur le programme. Mais, en jetant un dernier regard sur les spectateurs, quel ne fut pas mon étonnement d’apercevoir les austères parents de l’autre fois faisant assister à cette triste représentation leur fille qui paraissait y prendre beaucoup d’intérêt ! J’avoue que mon premier mouvement fut l’indignation ; mais ce n’est réellement qu’avec pitié qu’il faut envisager une telle inconséquence.

Il est, je crois, sans exemple en France qu’un Cercle procure à ses membres, indépendamment des avantages sociaux attachés à ce genre d’établissement, le plaisir d’entendre de beaux concerts, et l’on peut donner cette qualification sans réserve : les plus grandes célébrités musicales sont venues au Cercle du Nord, et l’orchestre, composé d’artistes de talent et de bons amateurs, se comporte vaillamment. Je vais commettre ici une petite indiscrétion : par une faveur toute spéciale, j’ai assisté à une répétition de l’orchestre. Il est impossible de conduire plus consciencieusement et plus convenablement que M. Paul Martin, qui sait insister sur l’exécution d’un passage difficile sans froisser l’amour-propre de personne. Quant à son mérite de soliste, un disciple bien-aimé d’Alard a-t-il besoin de félicitations dont il doit être rebattu et que son glorieux titre lui acquiert légitimement avant même qu’on l’ait entendu ?

Nous avons en M. Lefebvre un accompagnateur bien précieux et dont les artistes étrangers qui ont contribué à nos concerts gardent un excellent souvenir.

Mais il faut tout dire, deux choses me choquent : Le piano est d’Érard, me dit-on ; est-il neuf ? est-il déjà ancien ? Je l’ignore. Mais je lui trouve, à partir du medium jusqu’à l’aigu, les tons secs et durs d’un vieil instrument. J’ai joué à Lille quelques pianos qui n’ont pas coûté son prix et qui lui sont supérieurs comme qua-