Page:Pinard - F. de Lesseps, 1883.djvu/17

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Il part pour Constantinople ou pour l’Égypte instantanément, sa petite valise à la main, grosse comme une gibecière. De 1854 à 1858, il fait par an dix mille lieues de plus que le tour du monde. Il est vrai qu’en chemin de fer on dort avec sécurité. On est seul, on se recueille, et l’être humain surmené se retrempe dans ces reprises de soi-même au cours de ces voyages, moments précieux où la réflexion mûrit l’action. Pendant toute la période préparatoire, il apparaît au Caire, à Constantinople, à Paris, à Vienne, à Londres, à Odessa, éclairant son chemin par des traînées de conférences qui dessinent un sillon lumineux sur toute l’Europe.

Il commence « l’agitation pour Suez ». Partout il parle au débotté, ayant toujours présents les faits et les chiffres. Jamais il ne s’arrête pour un mot rebelle, bousculant avec bonhomie la syntaxe, et, comme il met plus de chaleur et de saillie que de coquetterie dans son langage, il parle aussi rapidement qu’il agit. Il porte en tout lieu cette parole bien française par sa clarté simple ; un discours de lui n’est pas une œuvre de rhétorique, c’est un acte. À tous il expose son plan et le résul-