Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/123

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mandai un jour le sujet de son chagrin ; son embarras me fit soupçonner une partie de la vérité. Après plusieurs défaites, il m’avoua qu’il avoit quelquefois des altercations avec sa maîtresse, et qu’elle le traitoit avec beaucoup de hauteur et même de dureté. C’est-à-dire, lui répondis-je, que vous êtes subjugué, et que cette femme-là n’est pas contente d’avoir un amant auquel elle ne devoit plus raisonnablement prétendre, à moins qu’elle n’en devienne le tyran. Je voulus lui rappeler alors ce que je lui avois déjà dit. Vous ne m’apprendrez rien, reprit-il en m’interrompant, que je ne sache, et que je ne me sois dit. Je sens avec vous, et avec tout le monde, le mépris qu’elle mérite, c’est ce qui achève mon malheur ; je la méprise et je l’aime. Dans ce cas, lui répliquai-je, je ne puis que vous plaindre ; mais j’imagine qu’il n’est pourtant pas difficile de rompre un engagement dont on rougit. Ce n’est pas tout, reprit-il ; je la redoute : c’est un étrange caractère, une femme emportée qui est capable des partis les plus violens. Je lui ai fait connoître que j’étois excédé de sa tyrannie, et sur le point de m’en affranchir ; elle ne m’a point dissimulé qu’elle ne me verroit pas infidèle impunément, et qu’elle auroit recours aux moyens les plus cruels. Impertinence de sa part ? repris-je ; ridicule de la vôtre ! elle n’est