Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/18

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Lorsque nous fûmes de retour à Paris, j’allai la voir. Elle ne me parla dans les deux ou trois premières visites que des choses qui pouvoient regarder ma conduite. Elle vouloit, disoit-elle, être ma meilleure amie. Un jour elle me dit de la venir voir le lendemain sur les sept heures du soir. Je n’y manquai pas ; je la trouvai sur une chaise longue, appuyée sur une pile de careaux. On respiroit une odeur charmante, et vingt bougies répandoient une clarté infinie ; mais toute mon attention se fixa sur une gorge tant soit peu découverte. La marquise étoit dans un déshabillé plein de goût, son attitude étoit disposée par le désir de plaire et de me rendre plus hardi. Frappé de tant d’objets, j’éprouvois des désirs d’autant plus violens, que j’étois occupé à les cacher. Je gardai quelque temps le silence ; je sentis qu’il étoit ridicule ; mais je ne savois comment le rompre. Êtes-vous bien aise d’être avec moi, me dit la marquise ? Oui, madame, j’en suis enchanté, répondis-je avec vivacité. Eh bien ! nous souperons ensemble, personne ne viendra nous interrompre, et nous causerons en liberté ; elle accompagna ce discours du regard le plus enflammé. Je ne sais pas trop causer, lui dis-je ; mais pourquoi ne me permettez-vous plus de vous embrasser comme à la campagne ? Pourquoi ? reprit-elle ; c’est que,