Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/63

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état par une de ces bizarres inconséquences dont on ne peut jamais rendre compte. C’est là que, sous le prétexte du recueillement, il leur est libre de faire avec très-peu de précaution tout ce que ce même public, si réservé sur elles, ne passeroit point aux femmes du monde. Enfin, sur cet article, les choses en sont au point que toute la différence ne tombe que sur les heures : on y dîne avec la dévote, on y soupe avec la femme du monde ; de façon que la même maison pourroit en quelque sorte servir à l’une et à l’autre.

Les visites des prisonniers, celles des hôpitaux, un sermon ou quelque service dans une église éloignée, donnent cent prétextes à une dévote pour se faire ignorer, et pour calmer les discours, quand par hasard elle est reconnue. Dès que le rouge est quitté, et que par un extérieur d’éclat une femme est déclarée dévote, elle peut se dispenser de se servir de son carrosse ; il lui est libre de ne se point faire suivre par ses gens, sous prétexte de cacher ses bonnes œuvres ; ainsi, maîtresse absolue de ses actions, elle traverse tout Paris, va à la campagne seule ou tête à tête avec un directeur. C’est ainsi que, la réputation étant une fois établie, la vertu, ou ce qui lui ressemble, devient la sauvegarde du plaisir.

Madame de Gremonville commença par me faire cent questions différentes sur les femmes