Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/65

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de plus en plus sa confiance ; son mari même en plaisantoit avec moi : Prenez garde, me disoit-il souvent, si madame de Gremonville vous entreprend, elle vous convertira. Elle avoit fait observer ma conduite, elle m’avoit fait écrire des lettres qui m’offroient des aventures agréables ; mais le goût qu’elle m’avoit inspiré, et l’envie d’avoir une dévote me rendoient peu curieux d’autres intrigues, et produisirent en moi l’effet de la prudence. Enfin, après avoir subi tous les examens dont je pouvois le moins me douter, j’obtins un rendez-vous dans sa petite maison, où je fus introduit en habit d’ecclésiastique, et ce fut dans la suite mon déguisement ordinaire. Le masque ne donne pas plus de liberté à Venise, que le manteau noir en fournit à Paris, où chacun, occupé de ses plaisirs, ne pense guère à troubler ceux des autres.

Le prétexte d’un office particulier donna à madame de Gremonville le moyen de s’absenter, et de dire qu’elle dînoit chez une de ses amies pour retourner avec elle au service de l’après-midi. Malgré tant de précautions, elle prit encore celle de m’ouvrir la porte elle-même. Nous montâmes dans un appartement où régnoient à l’envi la simplicité, la propreté et la commodité. Je fis aussitôt éclater tous mes transports. Que vous êtes pressant, me dit-elle ! Quoi !