Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

crire. Je lui écrivis dans les termes les plus passionnés ; je lui marquai le regret que j’avois de la quitter ; je l’assurai que les reproches que j’aurois à me faire en acceptant ses dernières propositions, s’opposoient trop aux sentimens d’un homme d’honneur, et m’obligeoient à partir pénétré de ses bontés, dont je conserverois un souvenir éternel. Mon retour fut heureux ; le régent fut sensible à ma situation, comme l’abbé me l’avoit assuré, et mon affaire fut heureusement et promptement terminée. Peu de jours après mon retour à Paris, je reçus une lettre de milady, où tout ce que l’amour outragé peut inspirer, étoit exprimé. Elle finissoit par me dire un éternel adieu, et j’appris, fort peu de temps après, qu’elle s’étoit elle-même donné la mort. Cette nouvelle me plongea dans la plus vive douleur ; je ne fus plus sensible au plaisir de me retrouver dans ma patrie. Je m’accusai cent fois de barbarie. L’image de l’infortunée milady étoit toujours présente à mon esprit, et même aujourd’hui je ne me la rappelle point sans émotion.

Cependant mes amis n’oublièrent rien pour me tirer de la retraite où je m’obstinais à vivre, et pour dissiper les noires impressions d’une mélancolie dont ils craignoient les suites pour moi. Je me prêtai, d’abord par complaisance, à leurs empressemens et à leurs conseils, et bien-