femmes. Une froideur de bon goût dissimulait chez eux ce qui subsistait de l’anticléricalisme révolutionnaire.
Il s’affirmait avec moins de retenue chez les anciens jacobins, qu’il consolait de tant de choses auxquelles il avait fallu renoncer après brumaire. Beaucoup d’entre eux restaient énergiquement « anti-prêtres ». À leurs yeux, l’Église demeurait l’ennemie irréconciliable de la Révolution. Les regrets qu’on lui attribuait de la disparition de l’Ancien Régime la rendait suspecte aussi aux acheteurs de biens nationaux et aux notables ralliés au gouvernement. Sans doute, ils ne constituaient qu’un groupe au sein de la nation. Mais leur fortune et leur importance sociale compensaient leur petit nombre. Aussi longtemps qu’ils soutiendraient le gouvernement, celui-ci n’aurait pas à s’inquiéter d’une agitation fomentée par un clergé dont le prestige, si grand qu’il fût encore, n’était plus comparable à ce qu’il avait été au temps de Joseph II. Contre l’Église il existait désormais, sinon officiellement, du moins d’une manière latente, un parti anticlérical, tout acquis à la défense des prérogatives de l’État.
Malheureusement, l’État devait bientôt mettre ses partisans à une épreuve trop rude pour leur dévouement. Les fabricants et les entrepreneurs étaient les plus fidèles d’entre eux. Ils avaient applaudi à sa politique parce qu’elle avait ranimé, dès les débuts du Consulat, la prospérité économique. La guerre entreprise contre le commerce anglais et l’organisation du blocus continental par les décrets de Berlin (21 novembre 1806) et de Milan (23 novembre et 17 décembre 1807) avaient soulevé tout d’abord leur enthousiasme. Les Chambres de commerce de Verviers, de Tournai, de Courtrai et de Gand n’avaient pas manqué de féliciter le gouvernement de mesures qui abolissaient si complètement la concurrence étrangère[1].
Elles s’aperçurent assez tôt que leurs espoirs ne se réalisaient pas. Si le blocus avait tout d’abord galvanisé l’activité de l’industrie, ses conséquences ne tardèrent pas à lui susciter de graves difficultés. La fabrique des toiles de coton, dont les progrès avaient été si surprenants tout d’abord, se trouva la
- ↑ Levasseur, Histoire des classes ouvrières en France, t. I, p. 486.